J’ai des fibromes. Pour moi, c’est le résultat de quand ton corps te parle (et que tu n’écoutes pas).
Avril 2024. Rendez-vous annuel chez la gynécologue, sans raison particulière. Juste pour être sûre que tout va bien. Le genre de contrôle que tu fais en mode “on check, on valide, on repart”. Je suis sur la table, elle palpe, elle tapote légèrement mon ventre, et elle me sort, tranquillement, comme si elle me disait “il pleut demain” : « Ah, je soupçonne un utérus fibromateux. » Moi : pardon ? Elle : ton normal, zéro drame. Moi, dans ma tête : “Fibromateux… donc fibromes… donc… MOI ?!”
Le film qui tourne dans ma tête
Là, j’ai eu un flash-back immédiat. Ma mère, quelques années plus tôt, opérée parce qu’elle en avait énormément. L’opération qui dérape. L’hémorragie interne. Et au final, l’hystérectomie. Donc littéralement, je me refais le film en accéléré, et je me dis : “Non mais ce n’est pas possible. Moi, je suis chrétienne. Moi, je suis abstinente. Et qui prie. Comment ça, moi je vais avoir des fibromes ?” J’étais dans un mélange très sophistiqué de foi, de panique et de déni. Le cocktail maison.
Elle me donne une ordonnance : échographie + prise de sang. Je ne fais pas l’échographie tout de suite, mais la prise de sang, je la fais quasiment immédiatement.
L’appel qui change tout
Je me souviens très bien de ce jour-là. Je suis chez moi, allongée, je lisais un livre. Et, le laboratoire m’appelle. Je sens l’inquiétude dans la voix de la dame avant même dès qu’elle prononce ses premiers mots. « Madame, est-ce que vous allez bien ? » Moi : « Oui. » Elle : « Il faut aller aux urgences tout de suite. » Et là je suis en mode : mais qu’est-ce qui se passe ?
Elle m’explique que mon taux d’hémoglobine est à 6. Que c’est très grave. Elle me demande si j’ai des vertiges, si je suis essoufflée, si je tiens debout. Et le plus absurde dans l’histoire, c’est que moi… je me sentais bien. Enfin, “bien” à ma façon. Parce que oui, j’avais banalisé des trucs. Oui, j’étais fatiguée parfois. Quand je faisais un effort physique, même tout léger, mon corps réagissait (fatigue, vertiges, essoufflements). Oui, j’avais des signaux. Mais je les avais classés dans la catégorie “t’es trop flemmarde, mets-toi au sport”.
Pour dire à quel point je ne réalisais pas l’urgence : j’ai pris une douche. Parce qu’il faisait chaud et que je voulais sentir bon. Je commande un Uber. Et me voilà aux urgences, entourée de gens qui arrivent en sang, de parents inquiets, du calme avant la tempête, et moi au milieu : “Mais qu’est-ce que je fais ici, en fait ?“
Aux urgences, sur mes deux pieds
Après des heures, je suis enfin reçue par un médecin d’origine camerounaise (précision importante). Elle m’examine, me demande si je vais bien, je lui répète que oui. Et elle me dit que je fais une anémie sévère. Elle m’explique aussi quelque chose qui m’a marquée : si le laboratoire a paniqué, c’est parce qu’une femme caucasienne, dans cette situation, aurait pu être au bord de la catastrophe. Là où moi j’étais arrivée… sur mes deux pieds. Les femmes noires ont un niveau de tolérance très élevé. Et que je traine cela probablement depuis des années. Depuis des années, j’avais encaissé, minimisé, normalisé.
Et franchement, elle n’avait pas tort. J’avais ressenti des choses, mais je les avais banalisées. Elle me prescrit une ordonnance pour vérifier la cause de cette anémie. Et je repars. Sur mes deux pieds. Ce jour-là, je ne réalisais pas encore que ça allait devenir un sujet dans ma vie.
Trois petites choses et une prise de conscience
Quelques mois plus tard, je fais enfin l’échographie. Verdict : trois fibromes. Dont un plus gros, 4cm (l’équivalent d’un citron). Et là… I was totally in shock. Non seulement, c’est bien réel, et en plus ça a la taille d’un agrume.
Sur le coup, je ne fais rien de spécial. Honnêtement, j’étais dans un mode très simple : On va prier, ça va passer. Je n’ai rien mis en place pour changer quoi que ce soit.
Été 2024 : le tournant
Et c’est là que, rétrospectivement, je vois la grâce dans le timing. Parce qu’en octobre 2024, je m’arrête. Fin de contrat, pause forcée. Et cette pause, je ne l’avais pas demandée, mais elle est devenue un espace de reconstruction.
Comme j’étais chez moi, j’ai commencé à être intentionnelle dans ma manière de vivre. Pratiquer une activité physique régulière.J’ai opté pour de la marche. Simple et efficace. Mieux manger. Je me suis mise à cuisiner, même si ce n’était pas mon hobby numéro 1. J’ai appris à composer une assiette (fibres, protéines, . Plus de légumes. Beaucoup moins de viande rouge. Une logique de nourriture qui nourrit vraiment, pas juste qui remplit. Je fais ça pendant des mois. Et mon corps commence à répondre. Moins d’inflammation. Moins de douleurs pendant les règles ou durant l’ovulation. Je sens des changements très concrets, très physiques. Et ça me pousse à faire un truc que je n’avais jamais fait avant : je me documente sérieusement.
Et là, j’apprends un détail qui change beaucoup de choses : parfois, ce n’est pas juste “manque de fer”, point final. Il y a des cofacteurs. Des éléments qui conditionnent l’absorption. Vitamine B12, B9. Tu peux avaler du fer comme si tu étais une barre de métal, si ton corps n’a pas ce qu’il faut pour l’utiliser, tu restes en galère.
Vie en Suède:jamais sans ma Vitamine D
Puis, vient le projet Suède. Pour préparer le Nord, le froid, le manque de soleil, je vois partout la même chose : vitamine D, vitamine D, vitamine D. Dès mon arrivée, je commence à prendre vitamine C et vitamine D tous les jours. Et ce que je ne savais pas encore, c’est que cette vitamine D allait devenir un élément clé dans tout ce puzzle. Je pense que je consacrerai un article entier à la relation intrinsèque entre les personnes noires et la vitamine D.
Un “combat” devenu universel
Au fil des ans, je me réalise que ce que je prenais pour une histoire personnelle ne l’est pas du tout. Autour de moi, le nombre de femmes qui souffrent explose. Anémie. Fibromes. SOPK. Endométriose. Et on ne réalise même pas à quel point c’est un enjeu collectif. On mange de plus en plus transformé. On vit sous stress permanent. Le cortisol explose. Les cycles se dérèglent. Et nos corps encaissent. Ils encaissent jusqu’à ce qu’ils parlent.
Parce que ce n’est pas seulement une affaire de fertilité. C’est une affaire de santé. Tu développes des tumeurs non cancéreuses, certes, mais tu développes des masses, des corps étrangers. Et c’est un signal. Un signal que quelque chose cloche. Un signal qu’il faut écouter au lieu de rationaliser.
Prendre soin de soi, vraiment
Depuis cet épisode, j’ai compris ce que prendre soin de soi veut réellement dire. Pas le self-care version bougie parfumée et playlist douce. Le vrai. Prendre soin de sa santé mentale, oui. Mais aussi de son corps. De son sommeil. De son alimentation. Mais aussi, de son stress. De son cycle. De son énergie. Et même spirituellement !
Mon corps est le temple du Saint-Esprit
Ce n’est pas une phrase décorative. Ça implique une responsabilité. Je ne peux pas confesser ça et ensuite ingérer n’importe quoi “parce que j’ai la flemme” ou “parce que j’aime trop”. J’ai même appris à me faire des “repas de la flemme sains”. Des repas simples, pas glamours, mais qui font le job. Le minimum efficace version santé. Et mon corps me le rend bien.
Et si je devais résumer ce que cette histoire m’a appris, ce serait simple : j’ai arrêté de traiter mon corps comme un décor. Je le traite comme un territoire. Et comme tout territoire, soit tu l’ignores et il se rebelle, soit tu l’honores et il te porte.
Message personnel
Chère femme, particulièrement vous femme noire, si vous banalisez vos symptômes : arrêtez !
Si vous êtes souvent fatiguée, avez des douleurs inexpliquées, ou même aucune douleur : allez voir un médecin. Un petit check-up peut vous éviter un drame. Et si on vous diagnostique un fibrome, une anémie, un SOPK, de l’endométriose : renseignez-vous. Éduquez-vous.
Mangez mieux. Bougez. Prenez vos vitamines. Réduisez votre stress.
Votre corps vous parle. Écoutez-le.
With Love, Christabel
